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Governance Monitoring Centre

16 July 2020

Surveiller la corruption et les dépenses publiques. Convaincre les citoyens d’aller voter lors des é

Depuis trois ans, le Governance Monitoring Center (GMC) surveille la corruption et les dépenses publiques en Géorgie. L’ONG a été fondée dans le but de combler le vide laissé par les plus grandes organisations qui s’intéressent à ces dérives sans toutefois prendre la peine d’informer le public.

« Nous avons commencé en produisant de l’infographie et de brefs articles », explique le directeur et co-fondateur du GMC, Zaza Abashidze, au FEDEM. « Nous avons gagné en popularité sur les réseaux sociaux et chacune de nos publications était partagée des centaines de fois. » La page Facebook de son projet phare, Squander Detector (détecteur de gabegies) est désormais suivi par plus de 25 000 internautes, un chiffre important pour un pays aussi petit que la Géorgie et le Centre est particulièrement apprécié par la jeune génération.

C’est ce succès rencontré sur Internet qui a incité les fondateurs de Squander Detector à prendre un statut officiel et à s’établir comme organisation afin de solliciter une aide auprès du FEDEM. L’initiative est aujourd'hui une organisation établie et respectée de la société civile de Tbilisi. L’ambition affichée est désormais d’étendre ses activités à d’autres régions.

Contrôler la corruption dans les provinces

« Grâce à l’aide reçu du FEDEM, nous avons pu ouvrir deux nouveaux bureaux », se félicite le vice-président de GMC, Gogi Zoidze, interrogé par la FEDEM aux côtés de M. Abashidze. « Le premier est à Batumi, la deuxième ville de Géorgie et le second à Chiatura, dans la région d’Iméréthie. »

Le choix de Chiatura n’a pas été laissé au hasard : cette région minière de l’époque soviétique assiste impuissante depuis plus de trente ans à l’exode de ses habitants. La ville enregistre également un bien triste record en matière de corruption, d’exploitation du travail et de protection environnementale.

Avec près d’un habitant géorgien sur trois vivant à Tbilisi, les régions sont souvent négligées par le gouvernement et la société civile, une tendance que GMC tente d'inverser.

L’équipe de Chiatura est composée de jeunes qui, après avoir terminé leurs études dans la capitale, ont décidé de revenir à Iméréthie pour aider leur région. Le bureau local est dirigé par Nodar Chachanidze, un militant local bien connu qui a remporté près de 25 % des votes lors des dernières élections municipales, un tour de force notable pour un candidat indépendant qui n’a pas de lien avec le parti au pouvoir, ni avec le principal parti de l’opposition.

Le bureau de Batumi est dirigé par un autre activiste local respecté, le journaliste et syndicaliste Malkhaz Rekhviashvili. Ce dernier a été récemment renvoyé de son poste de présentateur d’une chaîne de télévision locale après avoir critiqué dans un billet publié sur Facebook les sanctions disciplinaires prises à l’encontre d’un collègue.

Le GMC espère qu’avec ces deux figures du militantisme dans leurs bureaux régionaux, il bénéficiera de la même crédibilité et réputation dans les régions que son bureau phare de Tbilisi. L’équipe entend s'impliquer davantage dans la politique locale tout en poursuivant son travail consistant à documenter les cas de corruption. Le GMC assiste aux réunions du conseil municipal de Chiatura, afin de pouvoir ensuite faire part au public des décisions qui y sont prises. Il prévoit également d’organiser des événements citoyens, des expositions et des projections de film auxquels participeront les communautés locales.

Étroite collaboration avec les médias en période pré-électorale

À Tbilisi, le GMC continue de travailler en partenariat étroit avec les médias pour être sûr que les conclusions de ses recherches sur la corruption et les gaspillages de fonds publics soient portées à la connaissance du plus grand nombre. Récemment, Zaza Abashidze a été nommé au conseil d’administration de l'organisme public de radiodiffusion géorgien (GBP), le principal média du pays, une aubaine pour l’organisation.

M. Abashidze s’est engagé à poursuivre deux objectifs clés pendant son mandat : surveiller l’utilisation faite des deniers publics par le GPB et veiller à ce que le contenu produit par l’organisme soit juste et impartial, un aspect crucial dans le contexte des élections parlementaires à venir à l’automne prochain.

Dans un pays caractérisé par le nihilisme et la défiance à l’égard de la sphère politique, le GMS prépare une campagne visant à encourager les Géorgiens à aller voter lors des prochaines élections. Dans le cadre de cette campagne menée sur les médias, l’équipe réalisera une émission en ligne à laquelle seront invités des représentants politiques, des membres de la société civile et d’autres figures et intervenants de haut profil.

Elle prévoit d’organiser également une série de débats publics dans tout le pays sur les élections (le confinement sanitaire en Géorgie a été levé le 22 mai et le pays retrouve progressivement un rythme normal). Le GMC envisage également d’organiser des manifestations pacifiques (si nécessaire), des expositions et d’autres activités de sensibilisation.

L’équipe entend concentrer ses efforts sur Chiatura et la ville voisine de Sachkhere, ville natale de l’homme politique milliardaire, Bidzina Ivanishvili, fondateur du parti Rêve géorgien actuellement au pouvoir. « Nous allons sélectionner jusqu’à 50 circonscriptions dans ces villes et former les assesseurs afin qu’ils puissent surveiller les élections dans les bureaux de vote et veiller à ce qu’elles ne soient pas entachées d’irrégularités », explique M. Abashidze.

Il reconnaît cependant que c’est une tâche ardue. Il est déjà compliqué de dénoncer les cas de corruption du gouvernement local et encore plus difficile de convaincre des citoyens désillusionnés de s’impliquer activement dans la vie citoyenne. Sans oublier le risque évident qu’en informant mieux le public sur la corruption et les dépenses inconsidérées du gouvernement, il risque d’être davantage désabusé et de se détourner d’autant plus de la question politique.

Mais messieurs Abashidze et Zoidze sont optimistes. Ils rappellent que le système électoral a changé récemment, passant à un système proportionnel en réponse à des mois de contestation citoyenne l’an passé, montrant aux Géorgiens qu’en faisant entendre leur voix, les choses peuvent changer. Ils espèrent également que le nouveau système aura pour effet de dépolariser le paysage politique, favorisant l’émergence de partis politiques en phase avec les réelles attentes et préoccupations de la population.

Et M. Abashidze de conclure, « ces élections vont être cruciales. Nous devons décider si la Géorgie veut progresser et aller de l’avant ou si notre avenir sera englué dans la stagnation, voire la régression. Mais je suis convaincu que la population finira par comprendre l’importance de l’enjeu et que le jour des élections, les citoyens se mobiliseront et iront voter ».