Unir nos forces pour aider les citoyens et l’armée en temps de guerre

Lorsque la guerre en Ukraine a éclaté, cinq organisations locales se sont retrouvées à Poltava dans le but de former une association unique baptisée Poltava Volunteer Association (Association des bénévoles de Poltava), qui s’est depuis imposée comme le centre d’assistance le plus important de la région.

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« Nous avons commencé à nous réunir avec d’autres organisations locales dès le début du mois de février. Les gens ne pensaient pas qu’une guerre allait éclaté mais nous avions tout de même envisagé plusieurs scénarios et étudié la manière dont nous pourrions organiser les évacuations, le travail des bénévoles et l’aide humanitaire en cas de besoin. Nous avions réfléchi à la forme que prendrait notre collaboration », explique Oleksii Serdyukov, responsable de ZMIST Poltava, lors d’un entretien avec le FEDEM depuis Poltava, une ville du centre de l’Ukraine. Le 24 février, à l’annonce de l’invasion russe ce matin-là, les cinq organisations mirent leur plan à exécution, donnant naissance à la Poltava Volunteer Association.

L’association compte en son sein les entités suivantes : le média en ligne indépendant et partenaire du FEDEM, ZMIST Poltava ; Poltava Battalion of the Indifferent, l’une des plus importantes organisations caritatives de la région qui vient en aide à l’armée depuis 2014, affiliée au bénéficiaire du FEDEM Not Indifferent Team ; City Lab ; Center for Strategic Communications et l’association de bénévoles HelpGroup, tous deux également bénéficiaires de subventions allouées par le FEDEM.

« Chaque organisation a sa spécialité et son domaine de compétence particulier. Nous avons dû organiser notre travail le plus efficacement possible. Il nous fallait créer une structure nous permettant de coordonner notre aide de manière systématique. Nous voulions tous être impliqués et apporter notre aide », poursuit Oleksii.

À ce moment-là, l’équipe ne savait pas si et quand Poltava serait directement ciblée par l’armée russe. Une grande partie de l’équipe de ZMIST, principalement constituée de femmes, a été évacuée dès les premiers jours du conflit et chacun continue de contribuer à ZMIST Poltava à distance.

Nous sommes prêts. Poltava.

Le jour où la guerre a éclaté, le groupe a créé sur Telegram un compte qui se traduit par « Nous sommes prêts. Poltava », servant à publier les besoins urgents, essentiellement pour l’armée et l’armée territoriale dans un premier temps. Le compte a été très largement suivi et l’initiative s’est avérée fructueuse.

« Au bout de quelques heures seulement, 25 000 personnes étaient déjà inscrites. Les citoyens réagissaient très vite à toutes les requêtes que nous publiions, et nous avons pu réunir d’importantes sommes d’argent. Une publication en date du 25 février a, à elle seule, permis de lever 1,5 million d’Hryvna (près de 50 000€) au cours de la journée », se remémore Oleksii. « Nous écrivions ce dont nous avions besoin et les gens répondaient immédiatement. Si nous avions besoin, par exemple, de 30 personnes pour nous aider, deux minutes après nous les avions. Les gens voulaient se rendre utiles, par tous les moyens. »

Près de trois mois après, le compte reste très actif et d’autres ont été créés, notamment pour venir en aide aux personnes qui ont besoin de se loger ou d’avoir accès à des médicaments.

L’une des priorités du groupe depuis sa création a été d’aider l’armée, en lui fournissant du matériel et des équipements indispensables, comme des gilets pare-balles, des drones, des 4X4 et des munitions. Plusieurs entreprises locales ont fait don d’importantes sommes d’argent dès les premiers jours du conflit. Conscients que ces mêmes entreprises étaient aussi durement touchées par la guerre et qu’ils ne pouvaient pas compter sur leur soutien indéfiniment, les bénévoles se sont mis en quête d’autres sources de financement.

« Nous avons lancé le projet « Food bloc », en référence à un bataillon de l’armée. Les restaurants de Poltava ont accepté d’inclure dans leur menu des plats ayant un thème militaire et reversent les bénéfices à l’association. Cette initiative rapporte entre 1 000 et 2 000€ par semaine. C’est une source de revenue stable sur laquelle nous pouvons compter », explique Oleksii.

Coordination des bénévoles dans la cathédrale de la Dormition

C’est dans la cathédrale de la Dormition de la ville que s’est établie une plateforme de bénévoles qui assure la coordination avec d’autres associations de la ville. Ce lieu est hautement symbolique dans la ville de Poltava, connue pour être la capitale spirituelle de l’Ukraine.
À ce jour, plus d’une tonne et demie d’aide humanitaire a été reçue et distribuée dans les régions voisines durement touchées par le conflit, à l’image de la province de Kharkiv.

Oleksii souligne la nature hautement technique de ce type de travail qui exige une organisation irréprochable. « Nous avons un service logistique, un service comptable et des bénévoles qui chargent et déchargent les marchandises. Nous comptons en tout quelque 90 personnes dans notre équipe. Nous installons des caméras dans nos entrepôts et nous veillons à ce que tout soit fait dans la plus grande transparence. Nous avons mis au point un système qui garantit que l’aide humanitaire est acheminée vers ceux qui en ont réellement besoin », insiste-t-il.

Oleksii fait remarquer que le député Dmytro Nalyotov a joué un rôle crucial dans ce processus, assurant un contact permanent avec les autres acteurs politiques du pays.

Durant les premières semaines du conflit, ZMIST et leurs partenaires ont joué un rôle important, participant activement à l’évacuation des civils dans les régions ravagées par la guerre, notamment Kharkiv et Sumy. Oleksii raconte comment ils ont affrété des bus à destination de ces régions, remplis de médicaments à l’aller et de civils au retour, qui n’avaient aucun moyen de transport.

ZMIST gère également un entrepôt médical où se rendent des pharmaciens pour dispenser des médicaments à la population locale, notamment des hormones thyroïdiennes dont ont besoin un grand nombre d’habitants de la région en raison des séquelles subies après la catastrophe nucléaire de Tchernobyl, ainsi que des médicaments de base destinés aux forces armées, comme des antibiotiques et autres médicaments courants et du matériel de protection.

Poursuivre le travail

Oleksii reconnaît volontiers que l’aide allouée par le FEDEM dès les premiers jours du conflit a été cruciale. « Elle nous a permis de rémunérer nos bénévoles. Ils ont eux aussi besoin de gagner leur vie et de nourrir leur famille. Pouvoir leur verser un salaire nous a permis de faire notre travail correctement tout en leur donnant les moyens de travailler efficacement », souligne Oleksii.

Après quatre mois de conflit, la Poltava Volunteer Association a bien du mal à obtenir l’aide humanitaire dont elle aurait besoin. « L’aide qui nous a été envoyée de pays européens il y a quelques semaines ne nous parvient pas et nous ne pouvons répondre aux besoins de tous. Si Poltava reste une ville relativement sûre, la situation dans la zone occupée est dramatique. Plus de 1 000 soldats de notre région ont trouvé la mort dans ce conflit, s’émeut Oleksii.

« L’aide que nous recevons de l’Union européenne aide l’Ukraine à se défendre. Je suis convaincu que notre survie dépend de notre capacité à unir nos forces, comme nous le faisons déjà », conclut-il.

 

Cet article reflète les opinions des personnes bénéficiaires de subventions et non pas forcément la position officielle du Fonds européen pour la démocratie (FEDEM), de la Commission européenne, des États européens ou de bailleurs de fonds.