SmartGov
21 April 2021SmartGov
Une ONG technologique qui aide les municipalités libanaises à accroître leur redevabilité et leur transparence.

Les fondateurs d’une ONG technologique à Tripoli, une ville du nord du Liban, sont convaincus qu’innovation sociale et innovation technologique peuvent aller de pair. SmartGov est une start-up qui met au point de nouveaux outils d’e-gouvernance, dont l’objectif est de faire entendre la voix des citoyens dans la gestion des affaires locales.
Il s’agissait là de l’une des principales revendications des centaines de milliers de manifestants – pour la plupart des jeunes – descendus dans les rues en octobre 2019 pour réclamer un changement radical de politique ainsi que plus de transparence et de redevabilité de la part du gouvernement. Les retombées de l’explosion catastrophique de Beyrouth, survenue en août 2020, et l’aggravation de la crise économique au Liban n’ont fait que renforcer l’urgence de ces revendications.
Ihab Hallab, entrepreneur social, militant et l’un des fondateurs de SmartGov, est convaincu que l’e-gouvernance constitue le meilleur moyen d’y parvenir. Il a expliqué au FEDEM, depuis les bureaux de SmartGov, que l’ONG coopérait étroitement avec les autorités municipales à Tripoli et qu’elle s’apprêtait à lancer une nouvelle application mobile qui permettra aux citoyens de dialoguer directement avec les pouvoirs publics.
La technologie au service de la transparence et de la lutte contre la corruption
« La technologie offre de nouvelles solutions pour éradiquer la corruption et améliorer la transparence au sein des instances dirigeantes, ainsi que pour promouvoir la participation citoyenne. Notre stratégie consiste à numériser tous les aspects des activités municipales, en garantissant la transparence et en rationalisant les dépenses en temps réel », précise-t-il.
Il souligne que cette application a été conçue pour être facile à utiliser. « Quiconque possédant un téléphone ou un ordinateur et ayant déjà publié quelque chose sur les réseaux sociaux est capable de l’utiliser. Par exemple si, en tant que citoyen, vous remarquez un problème dans votre rue, vous pouvez prendre une photo et l’épingler sur une carte. Vous pourrez alors voir en temps réel quand la municipalité prend connaissance de votre plainte et suivre les mesures prises pour y remédier en direct sur l’application. Tous les citoyens peuvent voir les signalements en cours de traitement et ceux qui ont déjà été traités par les pouvoirs locaux. »
L’application proposera également des formulaires électroniques, grâce auxquels les citoyens pourront demander des services, tels que la délivrance de permis et de certificats, via l’application mobile, ce qui permettra aux pouvoirs locaux de réduire la paperasserie.
Un projet lancé dans la municipalité de Tripoli
La municipalité de Tripoli est très enthousiaste à l’idée de ce projet. La municipalité a déclaré qu’il s’agissait d’un « projet absolument nécessaire », alors que de nombreux citoyens n’ont plus confiance dans l’État et la politique, et qu’il est vital de jeter des ponts entre les pouvoirs locaux et la population. SmartGov a déjà signé des contrats avec d’autres municipalités.
SmartGov a travaillé dur pour s’assurer que sa solution réponde aux besoins de la municipalité et de la population, et surtout qu’elle soit durable. Le volet technologique est très loin de représenter la majeure partie du projet.
« Pour que SmartGov puisse porter ses fruits, il faut prendre en compte les facteurs sociopolitiques et socioéconomiques, ainsi que les obstacles institutionnels à la numérisation. Nous avons mené une étude approfondie en amont et nous avons coopéré étroitement avec des acteurs de la société civile et du secteur public pour déterminer quels étaient leurs besoins et leur proposer la meilleure solution technologique pour y répondre », explique-t-il.
Une approche à 360° de l’innovation
L’expérience diversifiée des co-fondateurs leur a permis d’adopter une approche à 360° de l’innovation technologique. M. Hallab a déjà travaillé avec plus de 24 municipalités libanaises et il comprend très bien leurs besoins. Ali Amhaz est quant à lui un psychologue du travail renommé, diplômé de la London School of Economics.
- Hallab précise que le nom de l’organisation n’a pas été choisi au hasard. « SmartGov peut être décomposé comme suit : Le “S” pour la fourniture d’un “service personnalisé pour les citoyens et la société civile” afin qu’ils puissent co-créer avec le gouvernement ; le “M” pour l’utilisation des technologies “mobiles” les plus récentes ; le “A” pour le recours à l’“analyse” de données pour l’élaboration des politiques et la personnalisation de la communication ; le “R” pour “radicalement ouverts” afin de veiller à une plus grande redevabilité et transparence ; et le “T” pour “digne de confiance” (“trustworthy” en anglais), nos solutions étant résilientes et sûres », explique-t-il.
D’abord à l’échelle locale
- Hallab explique qu’il prévoit de déployer SmartGov au niveau local dans un premier temps, afin d’accumuler de l’expérience et du soutien, avant de porter le projet au niveau national. Il est également convaincu que la technologie de SmartGov recèle un énorme potentiel pour une utilisation dans d’autres pays du Moyen-Orient et des pays en développement.
Ce dont il est sûr, c’est que SmartGov restera une ONG, la seule ONG au monde spécialisée dans la gouvernance électronique. « Pour moi et mes co-fondateurs, il s’agit d’une cause importante. Nous croyons que cette technologie peut révolutionner la manière dont les pays sont gouvernés et c’est pourquoi nous proposons ce service gratuitement au gouvernement », ajoute-t-il.
Le FEDEM a octroyé un financement d’amorçage à SmartGov afin de permettre son lancement en juin 2020. Aujourd’hui, l’ONG est officiellement enregistrée et compte 13 employés. Elle a rassemblé une fourchette d’experts impressionnante et suscite un intérêt considérable de la part d’autres organisations internationales convaincues de la viabilité et de la durabilité de cette technologie. M. Hallab est confiant pour l’avenir. « Le projet est entre de bonnes mains », affirme-t-il.